vendredi 15 novembre 2013

The Legend of Zelda: A Link to the Past par Mathieu Goux.

Anecdotes de gamers
Une fois par mois (parfois deux) un joueur expérimenté (de la catégorie des passionnés les plus vifs) nous fait revivre une licence, un jeu marquant, une console... autour de ses souvenirs personnels, d'anecdotes inédites et autres petits plus qui forgent le style et la passion.


Il est un jeu on ne peut plus régulièrement cité parmi les chefs d'œuvre du média : The Legend of Zelda: A Link to the Past. Sorti en 1991 sur la « petite reine » des consoles, la Snes (la Neo-Geo ayant déjà volé ce titre par le passé), il a véritablement contribué à faire de la Légende de Zelda la saga que l'on connaît encore aujourd'hui. Certes, le premier épisode, fondateur, avait jeté un pavé dans la mare en proposant une immense aventure aux nombreux secrets, contribuant à créer une communauté qui aujourd'hui encore étonne par sa longévité ; mais Zelda II avait déçu par ailleurs, et tout un chacun attendait alors le retour du roi. Nintendo, en proposant une épopée longue et haletante, garnie de secrets et de miracles, avait parfaitement rempli son contrat et même fit la joie de mes compatriotes en proposant, c'était encore très rare, une traduction française d'excellent aloi sur notre territoire.


Le jeu se voulait d'une longueur mesurée : les publicités d'alors montraient un squelette affalé sur un fauteuil, une manette en main, devant sa télévision allumée, et le slogan de préciser : « Combien de temps vous faudra-t-il pour finir Zelda III ? ». De prime abord, A Link to the Past se lit comme une réécriture, ou un remake, du premier numéro. La chose n'était guère nouvelle sur Super Nes en ses premières années, ni même plus tard le long de sa carrière : nombre de « suites » n'étaient là, finalement, que pour proposer une version Super ou « améliorée » des classiques qui ont bercé les enfances de tous. Aussi, si l'on écarte quelques nouveaux jeux qui ont depuis suivi leur bonhomme de chemin, les F-Zero, les Pilotwings et consorts, Super Castlevania IV a été présenté au Japon comme une amélioration de Castlevania, Super Metroid nous ramène sur Zebes après avoir exploré SR 388, Super Adventure Island nous proposait un polissage en règle des aventures du plus lèbre des héros à casquette rouge (hé oui !) et ainsi de suite : A Link to the Past  aurait pu se faire appeler  Super Zelda III sans étonner quiconque.



Le charme de la dénomination, cependant, qui renvoie aux calendes grecques la numérotation qu'avait prise Adventure of Link et qui sera alors le mot d'ordre pour la saga, laisse cependant présager qu'il y a bien plus ici qu'un simple palimpseste : le joueur qui reconnaîtra sans peine l'arc et ses flèches, le boomerang, le Rocher du Spectacle ou les Wizzrobes s'émerveillera alors devant le grappin  ou  les  médaillons  de  puissance,  le  Bourbier  de  la  Souffrance  ou  Trinexx,  la  tortue tricéphale. Surtout, ce qui avait frappé tout un chacun et qui n'a manqué de faire école, ce fut bien évidemment ce passage étonnant entre le Monde de la Lumière et le Monde des Ténèbres, l'aventure se poursuivant alors que l'on croit avoir jà atteint le dernier boss, le vil sorcier Aganhim : c'est soudain  un  univers  deux  fois  plus  complexe,  avec  nombre  de  secrets  et  de  portes  dérobées permettant de voguer de l'un à l'autre qu'il convient alors d'explorer. S'il n'est guère surprenant, aujourd'hui, pour les jeux d'exploiter le thème de la dualité spatiale, la chose était sinon unique, du moins rare et à cette époque les magazines ne composaient que l'unique source d'information des joueurs, nul doute que nombre furent émerveillés de cette charmante idée.

                                         (Zelda III par Orioto)
Au fur et à mesure du temps, parcourir A Link to the Past nous révèle qu'un jeu vidéo, ou qu'une œuvre quelconque par ailleurs, est bien plus que la somme de ses parties. Certes, graphiquement, la Super Nintendo tonne en proposant des sprites incroyablement fins et taillés, des effets de transparence, d'éclair, de pluie impressionnants ; certes, musicalement, les compositions de Koji Kondo étonnent par leur justesse et leur grandiloquence, de la ritournelle wagnérienne qui accompagne l'écran  titre à la sombre valse des donjons  en  passant par  la douceur  du  village Cocorico ; certes, ludiquement, les énigmes diverses mangent à tous les teliers, du labyrinthe pervers aux murs dérobés, des combats acharnés à l'astuce espiègle et à l'agilité preste ; mais il serait pour le moins réducteur de ne considérer ce jeu que comme un assemblage de tous ces éléments, comme s'il fallait mettre sans ordre ni mesure dans une grande marmite truffes, safran des Indes et champagne pour émoustiller les papilles. Ce qui apparaît progressivement, c'est qu'au contraire de certains cuistots en herbe, ici, tous s'accorde agréablement, magiquement, comme allant de soi. Impossible de ne pas fredonner le thème des bois perdus alors que le brouillard les enveloppe et que les voleurs nous harcèlent ; les trompettes du Monde des Ténèbres grandissent en nous alors que nous parcourons les étendues de poussière en décimant les cyclopes pyromanes ; et quand, au sortir d'un éprouvant combat nous ramassons ce pendentif ou ce cristal et que cette mélodie à présent bien connue s'entonne, ne sont-ce pas les battements de notre cœur qui semblent sourdre des enceintes de la télévision ?


Avec le recul réconfortant des années, A Link to the Past apparaît de plus en plus comme un « cas d'école », et je ne serai point surpris d'apprendre qu'on le donne à étudier aux potaches comme modèle illustre à imiter. Sans aller jusqu'à dire que le jeu est parfait, car aucun ne l'est ellement, force est de saluer sa brillante résistance aux affres du temps, le plaisir immédiat et sans ambages qu'il offre dès l'instant où on commence l'aventure, la mélancolie qui peut se dégager de certaines de ses séquences. Il parvient même à accomplir ce que nous avons depuis oublié, l'osmose parfaite entre ludisme et narration, entre histoire et jeu : car la trame de A Link to the Past a, depuis, inspiré nombre d'épigones.


Le manuel du jeu est ainsi un indispensable à quiconque voudrait se plonger dans l'aventure : en plusieurs pages richement illustrées le voilà nous conter le mythe des trois déesses, la création de la Terre d'Or, l'arrivée du Sorcier, et l'histoire de s'achever là où commence toute partie. Dans sa petite chambre qu'il partage avec son oncle, Link est éveillé par la voix d'une jeune fille qui le supplie de venir  la  secourir  dans  les  geôles  du  palais  royal.  Son  parent  sort  de la  demeure,  lourdement harnaché, lui recommandant de s'endormir : mais la curiosité l'emporte bientôt et c'est sous une pluie battante qu'il parviendra à trouver l'entrée d'une cave dérobée et qu'il obtiendra, des mains ensanglantées de sa seule famille, l'épée et le bouclier séculaire qui lui permettront de fendre le diable. En moins d'un instant, le joueur est alors plongé dans une quête dont le rythme ira crescendo et ce sans faire appel à de lourdes cinématiques, à de longs dialogues ou autres artefacts débiles destinés à nous intéresser : ce que propose Zelda III se suffit à lui-même. Il est le buisson ardent qui murmure : « je suis qui je suis », et rien de plus ; il est l'évidence faite jeu, et sa perfection est atteinte non dans le sens qu'il n'est rien à ajouter, mais qu'il n'est rien à enlever.
 

S'il  me  fallait  cependant  reprocher  quelque  chose,  ce  serait  bien  ceci :  sa  facilité  assez déconcertante pour qui aurait suivi la saga depuis ses débuts. L'immense sensation d'indépendance qui nous étreignait sur Nes a été troquée pour une liberté conditionnelle, dépendante directement et unilatéralement de l'acquisition des divers objets d'inventaire qui agissent souvent à la façon de « clés » permettant d'ouvrir de spécifiques serrures, rochers trop lourds à soulever et demandant un gantelet magique ou palmes permettant d'explorer les lacs et rivières. Contrairement alors à ses ancêtres, impossible pour le joueur hagard de se retrouver perdu au cœur du troisième temple alors qu'il cherchait le tout premier d'entre eux !


Cette structure, peuttre mieux affiliée à la série des Metroid, a le grand mérite cependant d'obliger le joueur à se fixer des objectifs clairs et, surtout, de se remémorer lors de ses explorations les endroits alors inaccessibles et où il devra revenir une fois l'expérience idoine acquise ; et quand bien même serait-il alors assez fort pour affronter les épreuves qui l'attendent au-delà de ce mur, encore lui faut-il résoudre les puzzles ignobles que lui ont préparés les concepteurs du jeu. Contrairement même à ce qui s'observera à l'avenir, les développeurs ont réussi ici à ménager quelque peu la « chèvre et le chou » et à proposer une aventure qui sait encore se faire rude du point de vue de l'action, et il n'est pas rare d'être submer par les ennemis alors que l'on cherche son chemin à la lueur d'une faible lanterne : tout est fait, cependant, pour permettre aux joueurs de terminer cette quête même s'il faut parfois suer à grosses gouttes face à un patron récalcitrant.


Tout ceci, je dois le dire, me passait au-dessus du ciboulot à l'époque. J'ai connu A Link to the Past relativement tard, peuttre en 1995 ou 1996, je devais avoir une dizaine d'années, tout au plus. Fervent lecteur de la presse vidéoludique, des Ultra Player, des Super Power et autres, je ne cessais de me faire rabâcher les oreilles par ce Zelda III que je ne connaissais ni d'Ève, ni d'Adam, pas plus que le reste de la saga par ailleurs. Finalement, j'ai demandé à ma mère de me le commander par l'intermédiaire de la Redoute et, une fois le colis reçu, je m'empressais d'y jouer. Je n'ai même pas su atteindre la fin du tout premier donjon et libérer la princesse : je mourrais lamentablement dévorés par les rats et les serpents. De colère, jjectais la cartouche de la console et ne la ressortais que quelques mois plus tard. Il faut dire également qu'à cette époque je ne me piquais guère de jeux d'aventure : je ne me consacrais qu'aux jeux de plates-formes, aux Mario, aux Donkey Kong et autres et aux puzzle-games, étant toujours imbattable à Tetris et à Dr. Mario. Ce n'est qu'alors que j'y repensais succinctement, et que je trouvais dommage de passer à té de ce que l'on me vendait comme un jeu d'exception, que je me fis souffrance et compris alors tout ce que je viens de vous raconter. Comme le dira un jour Bill Watterson, créateur de Calvin & Hobbes : « Right lesson, wrong moment. » Il est des œuvres que l'on ne peut apprécier qu'avec abnégation ou en attendant le moment idoine, et c'est d'ailleurs ce pourquoi je redonne toujours une seconde chance à ce que je n'ai guère aimé, quelques temps après, pour confirmer ou infirmer mes impressions premières : l'âme doit parfois s'épanouir un peu pour goûter le parfum des roses.


Quoi qu'il en soit, je me suis surpris à jouer de façon maniaque à A Link to the Past et encore à présent, je ne pense pas qu'il ne se passe une année sans que j'y revienne, sur la console originale, sur sa réédition sur Game Boy Advance ou par l'intermédiaire de la Virtual Console ; je dois à présent connaître le moindre de ses secrets, la moindre de ses touffes d'herbe, j'ai dû soulever toutes les poteries, tuer tous les monstres. Plus que d'autres jeux que j'ai pourtant épuré au combien, les Little Big Adventure, les Abe's Oddysee, les Rayman, il est celui que je connais jusqu'au bout des doigts et je puis sans nul doute le faire les yeux fermés.


Mon obsession pour ce titre a eu une retombée malheureuse, puis-je dire, mais on peut toujours en discuter : je n'ai su faire autrement que de comparer les jeux d'aventure, en deux dimensions mais également en trois et jusqu'à aujourd'hui, à A Link to the Past. Leur rythme, leur grandiloquence, leur profondeur, leur intelligence, leurs musiques, tout ceci et bien d'autres choses doivent rivaliser avec les sentiments que j'ai pour cet épisode précis de la plus connue des légendes. Peu d'entre eux, il faut le dire également, rivalisent parfaitement même si certains parviennent à s'en approcher, ce qui est jà honorable : mais médiocre est llève qui ne dépasse pas le maître et j'attends encore, lil aiguimais le cœur ouvert à toutes les surprises, l'étudiant qui saura un jour me faire oublier le professeur qui m'asséna un tel magister dixit.

Mathieu Goux 
« Sans doute plus auteur qu'acteur et moins menteur qu'on ne pourrait le croire, je passe mes journées entre mon travail de chercheur en linguistique, la rédaction de mes romans et l'écriture du jeu vidéo. De là, je pense être scientifique sur Radio01.net, nostalgique sur Grospixels.com et vindicatif sur Zeplayer.com. Je ne sais encore si je serai spécialiste en lettres et amateur en jeu vidéo ou le contraire ; mais tant que la musique joue, j'écrirai. »
 

2 commentaires:

  1. Il y a actuellement un jeu mobile qui ressemble fortement à Zelda, il s’appelle Oceanhorn. Est-ce que tu as eu vent de ce ludiciel, dis ? Par ailleurs, si tu es aussi fan de jeux mobiles, je t’invite à découvrir le jeu de réflexe Ninja Barbecue Party, tu ne seras pas déçu ;) ! https://play.google.com/store/apps/details?id=fr.virgoplay.application.ninja_bbq_party

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