vendredi 1 mars 2013

Zombi (Ubi Soft,Cpc 464,1986)


Avant de devenir le troisième développeur de jeux vidéo au monde (derrière Activision et Electronics Arts)  -avec 1,061 Milliards de Chiffre d’affaires réalisées entre 2011 et 2012- Ubisoft, presque 30 ans plus tôt,  s’appelle encore  Ubi Soft (en deux mots) et est seulement distributeur. Mais si la petite entreprise Bretonne ne crée pas encore de jeux vidéo cela ne va pas durer. Le gouvernement en cette période, incite (financièrement) les distributeurs à augmenter leur offre en titres « made in France » et  Ubi Soft, bien implantée, se doit de suivre cette voie.    
Le premier jeu d’Ubi soft 


Lorsque Yannick Cadin arrive dans le bureau de Rainbow production, situé  juste au dessus d’un magasin de jeu vidéo -au numéro 13 du boulevard voltaire, le fameux Coconut république- il est tout juste majeur. Inscrit à l’école dans une filière peu stimulante (Informatique et gestion)  l’apprenti programmeur (qui n’a alors qu’une centaine de lignes en assembleur à son actif) y accompagne un ami (en lien avec l’entreprise) piqué par la curiosité de voir, de prêt, des programmeurs professionnels.  Il croise là Patrick Daher déjà responsable des graphismes d’« Attentat » (sur CPC 464) pour le compte de la jeune boite mais aussi une jeune femme, Sylvie,  qui va bientôt changer sa vie. Sylvie monte une équipe. Elle est en quête de programmeurs. Venue ici pour débaucher le graphiste maison elle propose à Yannick, malgré sa faible expérience, de la rejoindre également. Cette charmante dame travail pour le compte d’Ubi Soft, distributeur influant, et a donc cette mission : mettre en place une cellule de création de jeux vidéo.  


Yannick  rejoint bientôt le projet (dans les fameux locaux de Créteil) et quitte l’école dans la foulée. Au total l’équipe compte quatre personnes. Deux  membres de Rainbow production : le graphiste fraichement débauché (Patrick DAHER) et le compositeur  (Philippe Marchiset)  auxquels s’ajoute  un ami de Daher au  scénario : Alexandre Bonan. Yannick, pour sa part, s’occupe de la programmation.


Bonan , pour le sénario du jeu, s’inspire du film  « Zombi » de Georges A. Romero - après avoir visionné la version remontée par Dario Argento ; un montage peu moins gore et plus rythmée que la mouture originale.  Marchiset, pour la musique (sans se soucier des droits d’auteurs), greffe au titre les quelques notes, si caractéristiques,  des « griffes de la nuit » - encore tout frais dans les esprits. Daher, en charge du décorum -et dans la lignée de son titre précédent-  y ajoute des couloirs, où pullulent des Zombis et se déplace le héro ; en vue subjective pour ce dernier. 


(Attentat CPC 464- Rainbow Production)

Cadin, coté gameplay, nous invitent, à arpenter les lieux -un vaste centre commercial de quatre niveaux et un sous-sol – en mêlant aux  phases de recherches des phases d’actions. Il  crée ainsi le genre « aventure-action » et offre ses bases au point & click. Pas mal… pour une première !    


Nous sommes en 1986, date de sortie du titre, mais aussi période durant laquelle il se déroule.

Le récit met en scène quatre personnages. Au début du jeu ceux-ci ont pris possession d’un hélicoptère et sont à cours de carburant, ils finissent par atterrir sur le toit d’un centre commercial. Reclus dans ce temple de la consommation, infesté de zombis et de Hells angels (reconvertis en pillards), ils se mettent en quête de carburant et dans le but de repartir. Pour se faire ils n’ont que 24 heures ! Pas simple…

Rien ne semble manquer  dans les rayons. Un vidéo-club, un opticien, un magasin d’informatique (où trône le logo d’Atari), un « Mac-gro », une armurerie ect. Malheureusement, le contexte ne se prête pas trop au shopping. Et trouver le moyen de partir rapidement devient votre obsession. Les morts-vivants sont de plus en plus nombreux et bouffent et tuent tout âme qui vivent. Du Dead Rising, 20 ans plus tôt.     


Les quatre survivants s’appellent Yannick, Patrick, Alexandre (comme le programmeur, le graphiste, et le scénariste du jeu) et Sylvie… la chef d’équipe, dans la vie vraie ^^ !

Le joueur control, tour à tour, les quatre personnages et se doit de surveiller leur état de santé pour éviter le Game over - trois jauges de vie représentant le sommeil, la faim et la soif.  Il y a une importante quantité d’objets qui jalonnent les dédales du jeu. Et l’ambiance monocrome en accentue l’importance. Ces objets apparaissent, en effet, en surbrillance, et scintillent d’un bleu limpide, contrastant de la sorte avec le background, grisâtre le plus souvent. Mais bon, beaucoup de ces items ne servent à rien !


Et à la résolution d’énigmes, en lien avec cette quête d’objet, s’ajoute des combats en temps réel. Passé plus de huit secondes dans une pièce et les ennemis attaquent ! Pour y faire face il faut leur porter plusieurs coups épars (divers objets servant d’armes blanches) en sélectionnant au bon moment le centre d’une jauge de tir. Le coup de fusil dans la tête restant le plus efficace, un tir seulement et c’est réglé. A noter, si l’un des personnages est mordu, il devient l’un des leurs … il est alors préférable de les éliminer.    
Les actions se valident avec le clavier ou le joystick – pas de souris pour le moment (par la suite, les versions ST et AMIGA du jeu proposeront de jouer avec la souris et un rendu couleurs… trois et quatre ans plus tard).


(Ci-dessus, une illustration peinte d'Alfonso AZIPIRI pour la sortie espagnole du jeu.)
                
Seuls quatre objets par personnage peuvent être conservés, soit 16 au total. De là, de fréquents allés & retours sont nécessaires durant les quêtes intermédiaires (rétablir le courant, déplacer un camion de 38 tonnes à l’extérieur du mall -et en boucher l’accès, stocker les cadavres dans la chambre froide, ect.)… l’angoisse monte crescendo. On pense au premier Résident evil et au system des coffres… avec un peu de recul.


Dix huit actions sont possibles. Manger, se reposer, passer d’une pièce à l’autre (ouvrir ou fermer une porte). Les objets à ramasser servent à résoudre les énigmes (torche, fusibles), à avancer (clefs) ou encore à se défendre (fusil à pompe) des zombis et autres « motard de l’enfer » et qui hantent les couloirs. Heureusement, on peut charger et sauvegarder sa partie à tout moment, mais la durée reste limitée.    


Une fois trouvé le carburant, il faut remontez sur le toit, puis repartir avec l’hélicoptère, sur un soleil couchant…

(Bande dessinée fournie avec le manuel du jeu)

Zombi, fait un carton ! Signant, par là même, l’avènement  d’un nouvel éditeur à succès, bientôt connu dans le monde entier. Il a été adapté sur Commodore 64, Dos, ZX Spectrum, Amiga et Atari ST. Fleuron du jeu made in France -et ce quelques 27 ans avant Zombi U (qui quant à lui, restera plus dans les mémoires comme étant l’un des premiers titres dédié à la WII U et pour s’arrêter là)- Ubi Soft, enchainera, à la suite de Zombi, d’autres jeux avec un déroulement assez similaire et les succès iront de pair.   

Manhattan 95, par exemple- signé aussi Yannick Cadin- et tout autant inspiré par un film de SF- « New York 1997 » de John Carpenter.